Omar, confiné à Varsovie : "Qui eût cru que les cours en présentiel un lundi à 8h15 pouvaient manquer ? "

Confinés depuis le 17 mars dernier, les étudiants et personnels de Grenoble INP poursuivent leurs activités à distance. Omar Mernissi, étudiant à Grenoble INP - Génie industriel et en échange Erasmus, est confiné à Varsovie.

Comment arrives-tu à t'organiser pendant cette période ?


Le confinement nous permet avant tout de nous rendre compte que des tâches, qui sont ordinairement bâclées ou évitées deviennent du jour au lendemain les seules tâches que l'on peut réaliser. Parfois, les seules qui pourraient justifier une sortie, comme sortir son animal de compagnie ou faire les courses. Pour sortir, nos préoccupations passent de "est-ce que j'ai éteint le four" et "est-ce que j'ai pris mes clefs" à "est-ce que je devrais vraiment sortir ?"; "Ma sortie est-elle justifiée ?"; "Où est ma déclaration sur l'honneur ?"; "Et si je mangeais ce qu'il y'avait dans mon frigo et laissais les courses pour un autre jour".

Pour l'alimentation, on y accorde beaucoup plus de temps que d'habitude. Je me suis découvert des passions pour les plats et desserts compliqués pour passer le plus de temps possible à "faire à manger", de peur d'être oisif. En faisant mes courses, je vais essayer d'acheter les aliments les moins transformés pour volontairement passer du temps à découper minutieusement des légumes pour ma soupe au lieu d'acheter une soupe en poudre, choix que je n'hésiterais pas à faire en temps normal. La prochaine étape culinaire "tue-temps" est de faire mes propres pâtes ! Affaire à suivre !

Un autre aspect de notre vie quotidienne pour lequel une nouvelle organisation est nécessaire est celui des loisirs. Comme on ne peut plus pratiquer de sports collectifs, aller au cinéma/théâtre, ou bien tout simplement ... sortir. Je me retrouve à lire ou relire des livres que je n'aurais jamais touché en temps normal, m'occuper religieusement de mes plantes et animaux de compagnie. Le sport est peut-être le plus difficile des loisirs à adapter en intérieur, en tout cas pour moi ça a toujours été synonyme "d'être dehors"... Petit à petit, on réussit à dénicher des cours de yoga en ligne ou des étirements exotiques qu'on pourrait pratiquer chez-soi, ce qui permet de rester en bonne forme !

Leurs désavantages ne manquent pas, mais en ces temps de confinement les nouvelles technologies sont nos meilleures amies. Je passe un temps non négligeable à surfer sur internet, en partie pour suivre l'actualité concernant le Covid-19, en France ou à l'étranger. Cela me permet de devenir un redoutable connaisseur des régions du Nord de l'Italie et leurs chefs-lieux ou encore découvrir chaque jour de nouvelles villes chinoises de plus de 10 millions d'habitants. Mais honnêtement, en cette période de confinement je ne culpabilise pas d'enchaîner pendant des heures entières séries et films...

 

Comment vis-tu l’organisation de tes études à distance ou en 100 % online ?


Je pense que partout en Europe les universités ont fait un travail exceptionnel pour fournir des cours en ligne de qualité en si peu de temps. Ici à Varsovie où je suis en échange, les plateformes pour cours en ligne fonctionnent depuis cette semaine et j'ai beaucoup de "devoirs maison". Des devoirs inoffensifs mais leur nom rappelle de ténébreux souvenirs de prépa... L'université ici favorise ces devoirs à rendre, car ils demandent moins d'organisation et les étudiants savent exactement de quoi il s'agit. A part ce type d'exercice des cours en ligne en visio conférence sont proposés.

Il est certes difficile de s'y faire au début, parce qu'en étant chez-soi les distractions ne manquent pas... Mais, une fois qu'on est rodé aux visio conférences et aux "devoirs maison", on a presque peur d’avoir du mal à reprendre les cours en présentiel !

 

Envisages-tu qu’ils se prolongent ou es-tu attaché au présentiel ?


Pour ma part, j'ai hâte que les cours en présentiel reprennent. Le fait qu'il n'y ait pas une dissociation physique entre espace de vie et lieu de travail/d'études, empêche ou du moins limite la dissociation entre l'état d'esprit "je suis au travail/en cours" et l'état d'esprit "je suis chez moi". Heureusement qu'on prend l'habitude au fur et à mesure et que les enseignants sont très compréhensifs...

Qui eût cru que les cours en présentiel un lundi à 8h15 pouvaient manquer ? Le confinement nous fait découvrir des avantages dont nous ne soupçonnions pas l'existence...

 

Complément au 30 mars 2020 :

Après envoi par l'établissement d'un appel à tous nos étudiants encore à l'étranger à rentrer avant que tout déplacement soit impossible :
"Concernant cet email, je ne suis pas "français" et donc pas "étudiant français" à l'étranger... Ceci étant, même si je rentrais en France, je ne saurais où aller ! Grenoble n'est plus une option parce que j'ai déménagé il y'a plus d'un an*, et j'étais le seul de ma famille à y vivre. Ma soeur habite à Paris mais ce n'est pas réaliste de rester chez elle dans son appartement parisien plus d'une semaine ou deux.

Si je rentre quelque part ce serait chez mes parents au Maroc, mais les frontières sont hermétiquement fermées même aux citoyens. Du coup, pour moi le plus raisonnable est de rester à Varsovie le temps que ça passe (la situation semble sous contrôle ici)... et après aller à Paris où je ferais mon stage de fin d'études à partir de Septembre. Ou au Maroc si j'ai le temps de voir mes parents avant d'aller à Paris.
"


* Omar était au 1er semestre en stage au Japon, avant de repartir pour étudier en Erasmus à Varsovie.